30 août 2014

E pour Expo



Expo.  Voici un mot inattendu, mais nécessaire, car un symbole important de l'histoire moderne de Montréal.  On peut dire que c'est l'Exposition Universelle de 1967 intitulée Terre des Hommes qui a vraiment mis Montréal sur la carte du monde.

Les expositions universelles ont commencé au milieu du 19e siècle.  C'est en 1851 qu'un hurluberlu a convaincu le monarque britannique (la reine Victoria) de financer une grande attraction temporaire dans un parc de Londres.  L'évènement fut un excellent prétexte pour la propagande du leadership de l'Empire Britannique dans l'industrie (l'hurluberlu en question revenait d'une démonstration industrielle en France) et surtout de pouvoir initier la classe moyenne aux merveilles de la mécanisation.  Dans l'organisation de choses pareilles, il y a toujours des excessifs limite mégalomanes qui mettent la barre très haute pour impressionner la galerie.  Ainsi, on construisit un gigantesque palais de cristal (temporaire) avec 400 tonnes de verre et 4000 tonnes de métal.  Cette première exposition fût un grand succès.  Un des exhibits les plus visités fût la toilette à l'eau. Comme personne n'avait l'eau courante à l'époque, c'est un peu comme s'ils avaient présenté la télévision, alors qu'il n'y a aucune production à mettre en ondes.

Palais de Cristal - Expo de Londres 1851

L'autre Expo marquante fût celle de St-Louis (pas du Ha!-Ha!, mais au Missouri) en 1904.  Elle coïncide avec la présentation des IIIe Jeux Olympiques dans la même ville.  Cette expo est reconnue pour ses premières: le hot-dog, le hamburger, la barbe à papa, le cornet de crème-glacée et le beurre de pinottes.  C'est un autre exemple d'escalade d'idées de grandeur: l'exposition couvrait 5 km carrés, incluait 1500 bâtiments avec 120 km de chemins pour les connecter. 

Ainsi donc, quand Jean Drapeau (maire de Montréal de 1954 à 1986 presque sans interruption) a obtenu le OK d'un comité international pour organiser l'Expo de 1967 à Montréal, l'univers en avait déjà vu d'autres.  Jean Drapeau a été un maire marquant pour la ville.  Il était caricatural (et fût très caricaturé et imité), rêveur et déterminé.  Il avait surtout des idées de grandeur et la vision de faire de Montréal une grande métropole n'ayant rien à envier aux autres grandes villes d'Amérique et d'Europe.  Ceux qui s'en rappelle rêvent que la ville retrouve un leader de sa trempe.

L'organisation de l'Expo 67 a laissé beaucoup de traces dans Montréal.  Le Métro par exemple.  Le Métro n'a rien à voir avec l'exposition, mais c'est en prévision de celle-ci que le projet fût accéléré pour être inauguré en 1966 (avec beaucoup moins de stations qu'aujourd'hui).  La courte ligne jaune, reliant l'ile à la rive-sud en passant par le site même de l'Expo a été terminée à temps en avril 1967.   Mais ce qui constitue le vestige le plus évident de l'exposition est sans contredit les iles Ste-Hélène et Notre-Dame qui furent le théâtre de l'exposition.  L'ile Ste-Hélène qui était déjà là, a été agrandie (!) et l'ile Notre-Dame a été créé à partir de rien (!!).  Eh oui, figure-toi donc qu'on a utilisé la terre excavée pour le Métro de la ligne jaune en plus de retirer des tonnes de matériel du fond du fleuve pour modeler l'ile Notre-Dame.  On a évidemment détruit un beau milieu naturel aquatique pour ce faire et vider des litres et des litres de pesticide dans le fleuve pour soustraire les moustiques et autres insectes nuisibles aux touristes.  Disons que les environnementalistes étaient moins actifs en 1967.

L'Expo fût un grand succès avec plus de 50 millions de visiteurs.  Je ne peux pas vraiment te décrire l'ambiance, car je n'étais manifestement pas là, ayant été conçu un peu après son ouverture, né en janvier de l'année suivante.  Ce qui est une évidence, c'est que le pari du maire a été tenu.  Le monde entier a découvert Montréal et Montréal a découvert le monde entier.  Intitulé Terre des Hommes, l'expo accueillait des pavillons de divers pays qui présentaient leur modes de vie ainsi que des pavillons corporatifs qui faisaient des démonstrations d'inventions et faisaient vivre des expériences audio-visuelles.  En pleine effervescence post-révolution-tranquille, la ville (et la province dans son sillon) a gravi un autre échelon dans son ouverture sur le monde, découvrant de nouvelles cultures, des aliments et des cuisines nouvelles.  Tous n'ont pas perdu tous leurs préjugés d'un coup, mais tout de même, la graine était semée.


C'est clair que c'est le succès de l'Expo qui a facilité l'obtention des Jeux Olympiques de 1976, un autre grand rêve du maire Drapeau.   Même si le battage médiatique et publicitaire entourant les Jeux à l'époque était beaucoup moindre que maintenant, c'est quand même quelques semaines où une grande partie de la planète a eu les yeux tournés sur Montréal (et un peu Bromont pour l'équitation).  Ce fût un sommet pour Montréal.  Pour boucler la boucle, c'est une équipe de baseball qui a fait vibrer le stade pendant les 25 années suivantes: Cette équipe s'appelait les Expos.

C'est b'en l'fun, mais qu'est-ce que ça change pour toi ?  Ça fait qu'aujourd'hui tu peux aller te promener dans le Parc Jean-Drapeau qui inclut les iles Ste-Hélène et Notre-Dame.  Tu y trouveras La Ronde (très peu pour moi), le circuit Gilles-Villeneuve (excellent endroit pour pratiquer le patin à roues alignées sur une bonne surface) et beaucoup de verdure avec une jolie vue de la ville.  Il reste malheureusement très peu de choses originales de l'Expo 67 et c'est très dommage.  Il y a la Biosphère (que ce n'est jamais clair qu'est-ce qui se passe là dedans) - pavillon des États-Unis en 67, qui demeure quand même une pièce spectaculaire et reconnaissable de très loin.  Le Casino de Montréal a été aménagé dans ce qui était le pavillon de la France, mais j'espère qu'on ne te verra pas traîner là.  Disons que considérant l'impact que l'Expo a eu sur Montréal, on aurait pu faire un meilleur travail de conservation du site. Si tu désires t'y rendre, tu n'as qu'un nom à retenir: Jean Drapeau.  Station Jean-Drapeau, Parc Jean-Drapeau. 



1967.  Ça fait déjà 47 ans.  Au printemps 1967, il n'y avait encore que les 6 équipes originales dans la LNH.  À l'automne, six nouvelles équipes s'ajoutaient pour la première expansion de la ligue dont les Kings, Flyers et Pingouins.  Et cette belle année 1967 où Montréal était à l'honneur avec son Expo, eh bien, ce sont les Feuilles qui ont gagné la Coupe Stanley en 6 contre les Canadiens.  Ce fût la dernière Coupe Stanley des Leafs à ce jour...  Montréal en a gagné 10 depuis ce temps, mais aucune depuis 20 ans...

Ça case le E.  Le suivant, c'est F.  F comme dans "Est-ce qu'on va enfin se rendre en Finale ?"

28 août 2014

D pour Détour


Détour.  Ce n'est pas un mot que tu risques de voir souvent si tu ne prends pas le volant.  Mais j'imagine que si tu trouvais la lampe d'Aladdin, je parie qu'un des trois souhaits aurait quatre roues, un moteur et une poche de hockey dans le coffre.  C'est un rêve d'étudiant depuis les années 50, mais c'est à y penser deux fois quand tu demeures dans une grande ville.

Quiconque a déjà été propriétaire d'une voiture se rappelle de sa première, surtout si elle a transporté ses cahiers et ses livres scolaires.  Mon frère m'avait vendu son superbe Oldsmobile Cutlass Ciera rouge198? à bon prix.  Mais un GM étant un GM, j'ai dû démarrer quelques fois avec un tournevis dans le carburateur (comme mon frère me l'avait bien expliqué) et surtout repartir assez souvent la radio intermittente avec une bonne claque sur le dessus du dashboard.  C'était quand même une voiture très propre, quoiqu'il aurait dû m'enseigner les rudiments de l'entretien régulier, mais le temps que ça aurait pris au prix qu'il me l'a vendue, ça n'aurait pas été très rentable pour lui, considérant mes aptitudes et et ma patience en mécanique.  Je l'ai eu jusqu'en mai 1991 pour faire la navette entre mon domicile de Sherbrooke, le travail à Bromont et la Polytechnique à Montréal.   En fait, mes derniers souvenirs de cette voiture sont un tête-à-queue sur la 10 avec Marc Hébert comme passager et un échange de baisers larmoyants avec Monia qui passait son dernier été à St-Louis, loin de son chum.  (J'espère juste que mes souvenirs ne s'inverseront pas en vieillissant.  Aussi il y a deux souvenirs distincts dans cette phrase, on n'était pas tous dans l'auto en même temps...)

J'invite les amis à commenter cette entrée pour nous présenter brièvement leur premier bolide.  Il me semble avoir connu des Chrysler LeBaron, des Volks Cabriolet et des Chevrolet Caprice.

Avoir une bagnole à Sherbrooke était bien sûr une bénédiction, malgré l'excellent système de transport en commun.  Pour Montréal, c'est une autre histoire.  Avoir une auto à Montréal, c'est souvent comme monter l'Everest en skateboard.  J'exagère comme une Pelletier, mais presque pas.  Le problème des grandes villes, c'est que le nombre de véhicules augmente plus vite qu'il est possible de planifier l'environnement urbain.  C'est encore plus vrai pour Montréal qui est une île et qui en plus vit présentement une revitalisation éternelle de ses infrastructures.  Vue de haut, la ville est orange.  Orange cône, orange pancarte de construction, orange signaleur, orange Crush.  Construction ou pas, probablement que pour des déplacements de moins de 15 km sur l'ile, un cycliste ou un piéton avec une carte de la STM va coiffer un automobiliste au fil d'arrivée la plupart du temps.  Surtout si l'automobiliste doit se stationner à l'arrivée.


Se stationner à Montréal relève non seulement de l'intelligence spatiale, car la majorité des stationnements se font en file dans la rue, mais aussi de l'intelligence analytique.  Il faut parfois utiliser l'algèbre linéaire, la théorie des ensembles et la lot des probabilités pour déterminer si une place de stationnement est permise et valable pour la période requise.  Ça c'est quand les pancartes n'ont pas pivoté au vent ou été tordues dans le mauvais sens par une déneigeuse.  La pancarte la plus répandue est celle qui ne permet le stationnement qu'aux résidents (identifiés par la vignette correspondant au quartier qui doit être bien visible dans une vitre de la voiture) selon certaines périodes de l'année et de la journée.  Il y a aussi plusieurs pancartes pour éviter que les voitures ne s'enracinent pour toujours sur le bord du trottoir. Elles empêchent donc le stationnement quelques heures pour des journées spécifiques, ce qui garantie que la voiture va libérer son espace au moins une fois la semaine.  Quelle galère.

Si tu te stationnes à un parcomètre, tu dois mémoriser le numéro de l'espace (L450 genre) et payer pour cet espace à la borne située un peu plus loin pour une période donnée.  Ces bornes acceptent les cartes de paiement.  Il y a évidemment un maximum d'utilisation consécutive ce qui oblige à revenir payer ou changer de place.  Si tu payes pour deux heures, que tu ne restes qu'une heure, tu ne récupères pas ton cash. Si 10 minutes après avoir libéré l'espace, un autre prend la place, il ne profitera pas de tes 50 minutes qui restent et il payera une autre fois pour la même heure.  Très payant pour la ville vs les anciennes machines mécaniques qu'on crinquait à la petite monnaie.

L'hiver, c'est pire que pire.  Il y a, en plus des interdictions régulières, le processus de déneigement qui installe des interdictions temporaires pour réussir à ramasser la neige.  Un remorqueur précède la déneigeuse et ramasse les voitures délinquantes au frais du propriétaire.  Mes pires souvenirs d'hiver quand on restait sur la rue Ste-Marguerite, ce sont les matins de tempête.  Nous n'avions pas de stationnement privé, alors je me stationnais dans la rue, déjà très étroite.  Je me levais déjà tôt pour me rendre à Bromont, mais les nuits de tempête, je devais me lever encore plus tôt, déneiger ma voiture qui était souvent totalement enchâssée dans la congère géante et compactée par la charrue.  Au retour du travail, évidemment, quelqu'un avait pris ma place pendant la journée en toute légalité, la rue étant à tout le monde.  Envoye, ressors ta pelle mon homme et fais toi un nouveau trou.

Pendant qu'on se cherche un stationnement (c'est souvent 80% du temps de déplacement du point A au point B), il y a quelques embuches à ne pas oublier.  Plusieurs de ceux qui ont compris que la voiture est un boulet se promènent à vélo été comme hiver.  En tant qu'automobiliste, il faut constamment s'assurer de ne pas faucher un cycliste, surtout dans les virages à droite, mais aussi à gauche.  La vérification de l'angle mort est pertinent plus que jamais.  En viraillant pour trouver une place, l'oeil chercheur oublie souvent de regarder les sens unique.  Prudence.  Aussi, sur l'ile, le virage à droite sur feu rouge est interdit (à moins d'avoir la flèche).  Une fois stationnée (maudite chanceuse, t'en as trouvé un), il faut ouvrir sa porte seulement après avoir regardé derrière pour éviter un emportièrage, c'est à dire, de pogner un cycliste en mouvement avec sa portière ouverte: over the bar, bonsoir il est parti.  Au mieux, il ne se casse que les bras, au pire, il rejoint la pomme qui est tombée de l'arbre à la lettre C.  On les aime les cyclistes.  Prudence.  Il n'est pas rare après avoir enfin trouvé la place, qu'on découvre qu'il y a une borne-fontaine (interdit), qu'on est trop prêt du coin de rue (interdit).  Mais plus souvent qu'autrement, on se gratte la tête plusieurs minutes en essayant de résoudre l'équation à 3 variables des cinq pancartes qui se contredisent.

Sinon, Montréal étant une île, les ponts sont des points d'étranglement majeurs.  Pour quelqu'un qui reste sur l'île, c'est moins pire que pour un habitant de la banlieue qui doit entrer et sortir quotidiennement, mais inévitablement la congestion déborde souvent sur les artères principales et finit par emmerder tout le monde.  La vague de cônes oranges affecte tous les ponts à divers degrés, surtout le Pont Champlain qui est au soins intensifs en attendant son remplacement.  C'est surtout aux heures de pointe qu'il faut éviter les ponts.  L'heure de pointe, c'est l'heure où la plupart des gens circulent pour se rendre et revenir du travail.  C'est donc du lundi au vendredi de 6:30 à 9:00 et de 16:00 à 18:00.  Ces heures tendent à s'étendre avec les années.

J'espère que tu es suffisamment découragée de t'acheter une voiture pendant que tu es à Montréal, mais comme on ne sait jamais, voici une représentation simple des grandes voies à retenir.  Les quatre accès à l'ile sont d'Ouest en Est:

  • Le Pont Mercier:  Accessible par l'autoroute 30, il mène directement à Lasalle.  C'est le chemin le plus intelligent pour connecter Cowansville et Lasalle.
  • Le Pont Champlain:  Ce pont, c'est l'autoroute 10 qui traverse le Fleuve.  Arrivé l'autre côté, tu as le choix de continuer sur la 10 en prenant Bonaventure à droite.  C'est le meilleur chemin entre Cowansville et le Centre-ville/Centre Bell.
  • Le Pont Victoria: Parfois fermé dans une direction.  Un bon dépanneur qu'on prend par la 132 (en entrée sur l'ile), mais difficile à planifier.
  • Le Pont Jacques-Cartier: Accessible par la 132 qui se prend de la 10 juste avant de monter sur le Pont Champlain.  Un bon choix si tu dois relier Cowansville à la portion est du Centre-ville (genre aller au Stade Olympique) ou si le Pont Champlain est jammé b'en dur.
  • Le Tunnel L-H Lafontaine: Ce tunnel est l'entrée à Montréal pour ceux qui arrivent de l'est sur la 20 (Québec genre).  Il débouche sur l'autoroute 25 Nord qui est un bon choix pour se rendre à Laval ou la rive-nord.

Sur l'île, les voies rapides encadrent le centre-ville:

  • L'autoroute 40 (Métropolitaine) traverse l'ile d'ouest en est.  Elle a un échangeur majeur avec l'Autoroute 15 (Décarie), l'échangeur Décarie.  Plus loin dans l'Est, la 40 croise la 25 à ce qu'on appelle l'Échangeur Anjou.
  • L'autoroute 15 (Décarie) est nord-sud et relie le Pont Champlain à la 40 (Métropolitaine) et dessert l'ouest.  La 20 croise aussi la 15 plus au sud dans ce qu'on appelle l'Échangeur Turcot.  La 15 mène aussi à Laval et à la rive-nord.
  • L'autoroute 20 (Transcanadienne) qui arrive de Québec, bifurque sur la rive-sud avant le Tunnel et se confond à la 132 jusqu'au Pont Champlain et part vers Toronto à L'Échangeur Turcot.  La 20 passe donc tout près de Lasalle sur sa route vers l'Ontario.
  • L'autoroute 720 (Ville-Marie) traverse le sud du Centre-Ville entre l'échangeur Turcot et le pont Jacques-Cartier. Elle se confond avec la rue Notre-Dame vers l'est et la 20 vers l'ouest.


Tu auras observé (ou peut-être pas):

  • Que le Pont Champlain porte à la fois la 10, la 15 et la 20 sur la même chaussée.
  • Que les numéros de route pairs sont parallèles au fleuve (est-ouest) et que les impairs sont perpendiculaires (nord-sud)
  • Que l'Échangeur Turcot et l'Échangeur Décarie sont des points névralgiques cruciaux pour Montréal.
  • Que l'Échangeur Turcot est une horreur indescriptible.  C'est à croire que tous les bons ingénieurs civils étaient partis rejoindre Jean-Louis dans le grand nord pour construire les barrages hydroélectriques quand ils ont lancé ce projet routier.  C'est tellement mal fait que la circulation est en sens inverse (comme en Angleterre) sur la portion de la 20 qui le relie à Lasalle.



J'ai un peu exagéré, mais presque pas.  Avec moins de voitures et une meilleure offre de transports en commun, la ville se porterait mieux.  Je n'ai aucune crainte que ça s'améliore avec le temps, car j'ai pleinement confiance aux décideurs de demain qu'on croise à la bibliothèque du collège et les arénas de la province.

C'est E qui vient après DE comme dans Euhhh, kessé que je voulais dire donc ?


26 août 2014

C pour Culture


Culture.  Te parler de culture physique serait d'une grande impertinence dans ton état de hockeyeuse aguerrie.  Te parler d'horticulture le serait tout autant en mon état d'inadapté du râteau et de la pelle.  Je propose plutôt de jaser de la culture de l'esprit.

S'il y a un grand avantage d'habiter la grande-ville, c'est bien d'être immergé dans une marmite culturelle bouillonnante.  C'est de loin ce qui me manque le plus 20 ans après mon exode vers Bromont.  Quand Monia et moi avons quitté la rue Ste-Marguerite pour venir habiter su'l'bord d'la track à Bromont, on avait la frousse de mourir d'ennui passé 16:30 et j'appréhendais les weekends dans le champ.  Il m'était difficile de laisser derrière moi la possibilité de voir un film, une exposition, une performance différente à chaque soir de l'année.  Cesser de voyager plus de deux heures par jour pour l'aller-retour au travail et l'attrait de la montagne ont vite occulté la perte de l'effervescence culturelle de la ville.  Aujourd'hui, un peu plus vieux et plus sensibles au décibels, on s'accommode très bien de la vie en campagne semi-urbaine, mais revenir à ton âge, je choisirais volontiers une adresse dans le 514 pour pouvoir profiter quotidiennement du feu roulant de culture qui anime la ville.

La culture, la culture, c'est bien beau, mais de kessé ?  Encore ici, bien du monde pourront critiquer ma définition, mais je dirais que la culture, c'est la nourriture de l'esprit.  Ça inclut tout ce qu'on apprend, mais surtout toute œuvre que l'humain crée et exprime qui a la faculté de stimuler notre cerveau qui peut le remettre en circulation en l'interprétant de divers façons.  Au centre de la culture, il y a l'art sous toutes ses formes: le dessin, la peinture, la musique, le cinéma, la littérature, le théâtre, l'humour, la mode vestimentaire, la sculpture, la gastronomie, l'architecture, la photographie, la danse, le cirque et même le sport. 

Architecture sur le Plateau Mont-Royal
On a tout ça en campagne quand on se déplace le moindrement, mais la ville, par sa concentration de civilisation est l'espace par excellence pour s'y baigner allègrement.  En fait, la ville offre plus de culture, parce qu'il y a plus de créateurs, mais surtout parce qu'il y a un plus grand public qui stimule plus de création.  Aussi, plus la ville est cosmopolite, plus l'offre culturelle est riche.  Les différentes ethnies apportent certes leur lot de créations typiques à leur civilisation, mais en plus, leur mode de vie ajoute parfois une nouvelle couleur qui constitue en soi une partie du spectacle.

Sans culture, la vie serait absolument insupportable. Quand nos décideurs mettent la hache dans la culture, ils sabrent dans le bonheur et nous ramènent à notre fonction biologique de base qui est vraiment aussi drabe que la pomme qui tombe de l'arbre fertilisant la terre pour la suite des choses (ça, c'est de l'agriCulture).

Montréal est un espace de culture très actif.  La langue étant un des récipients primordiaux de création, l'amalgame anglais-français (autrefois une collision) crée de brillantes étincelles particulièrement en musique. Tu vas me dire, oui mais ils finissent tous par chanter en anglais pour avoir du succès (Arcade Fire, Simple Plan).  Pas grave, dans l'Antiquité, ils auraient chanté en grec.  Ce qui est fascinant, c'est l'œuvre et l'influence importante de la dualité linguistique quand Régine Chassagne et Win Butler harmonisent leur voix.  C'est Montréal qui chante.  La proximité des États-Unis (le centre actuel du monde quoi qu'on en dise) est aussi un facteur qui influence Montréal tout autant que son fait français en Amérique.  Montréal, la grande résistante à l'envahisseur.  Toutefois, les perceptions varient vues de l'extérieur: les Américains trouvent que Montréal c'est le Paris nord-américain et les Européens trouvent que Montréal est le New York canadien.  C'est le côté insaisissable de la culture.  Au final, disons que Montréal est très cosmopolite et a créé le moins de ghettos possibles dans l'intégration des immigrants.  Ils s'agglutinent naturellement dans certains quartiers, mais c'est beaucoup moins pire que Paris.  Ça enrichit le mélange et on se retrouve avec des Rachid Badouri et des JoSH dans notre paysage.


Oui, mais comment profiter de toute cette richesse à partir de ta résidence étudiante ?  Bon, je concède que le gros des festivals se déroulent pendant la saison estivale: Francofolies, Juste pour Rire, Jazz, Nuits d'Afrique, Osheaga, Divers/Cité et j'en passe. J'imagine que tu reviendras en région pendant la saison d'été (dis oui, dis oui !).  Tout de même, l'hiver pendant que tu y es, il y a l'IglooFest (discothèque en plein air) et Montréal en Lumière (full d'activités pour tous incluant une nuit blanche avec full gratuités) qui essayent de sortir la ville de sa torpeur glaciale.  Mais ce ne sont pas vraiment des activités idéales pour des étudiantes à temps plein en pleine saison de hockey, n'est-ce pas ?  Ça ne veut pas dire que tu ne peux pas profiter de la vie culturelle pour autant.

Habitat 67
Juste se promener dans la cité est une expérience culturelle en soi.  D'abord, les gens qu'on croise dans la rue reflètent souvent les codes culturels de leurs origines: turbans, hijabs, robes colorées, kippas, dreads, manteaux d'hiver à 30 degrés, etc.  L'architecture est une exposition gratuite en plein air.  En marge des gratte-ciels, il faut remarquer (entre autres) les escaliers et les belles corniches dans les rues étroites du quartier Plateau Mont-Royal (entre Sherbrooke et Jean-Talon, entre du Parc et Papineau), le bizarroïde Habitat 67 (près du Pont de la Concorde - en s'en allant vers l'Ile Ste-Hélène) et les fabuleux domaines des riches anglais au pied du Mont-Royal (nord de Sherbrooke entre Guy et University) avec tout le campus de l'Université McGill.  Il y a bien plus, mais je m'en garde pour plus tard.  En opposition à cette beauté convenue, il y a les graffitis.  Une drôle de forme d'art, souvent vandale, parfois la vermine du mobilier urbain, mais parfois aussi l'expression colorée et très originale d'artistes marginaux.  Je suis toujours impressionné quand je regarde Infoman à la télé, car le réalisateur trouve toujours des graffitis magnifiques comme toile de fond pour Jean-René.  C'est un bel hommage à ces artistes silencieux.
Ravenscrag

Pour tout le reste, la musique, l'art visuel, le cinéma et les spectacles, ton adversaire est le temps.  Après tes cours, ton étude, tes pratiques, ton entraînement, tes parties de hockey et le social, il ne restera probablement que des miettes de minutes.  Le truc, c'est d'allier social et culture et par exemple, amener la gang voir un truc "culturel" qu'ils n'ont jamais vu.  Excellente activité de "team bonding". Ton deuxième adversaire est l'argent.  C'est bien beau la culture, mais un artiste, même si ça ne vit pas riche, il faut bien que ça gagne sa vie, sans compter le producteur, le distributeur, le promoteur et le vendeur de billets.  T'as eu beau travailler à la planche (la pognes-tu ?) tout l'été, ton budget n'est pas infini.  J'omets donc de parler de la Maison Symphonique, de la Place des Arts et des dizaines de musées et de salles de spectacles. Quand même, ton alliée ici, c'est ta carte étudiante qui va probablement te donner des rabais à peu près partout où tu vas passer.  Il y a aussi la carte Accès-Montréal (8$) qui donne un autre rabais (parfois additionné à la carte étudiante), mais tant que tu ne sais pas où tu auras le temps d'aller, ça ne vaut peut être pas la peine.  Reste à l'affût, il y a toujours des gratuités et des performances publiques surtout dans le Quartier des Spectacles.  Par dessus tout, observe et écoute, il y a de la culture partout.  C'est dans les yeux et les oreilles de l'observatrice que ça se passe.



J'ai gardé la bibliothèque pour la fin.  La Grande Bibliothèque (coin Maisonneuve, Berri) est une construction récente qui vaut le détour.  Les boiseries à l'intérieur invitent à la contemplation des rayons de livres et constitue un espace suffisamment paisible pour lire et étudier.  Il y a sûrement une bibli à André-Laurendeau et à ta place je l'étudierais en profondeur.  Y a-t-il de bonnes tables de travail, y a-t-il des recoins super tranquilles, y a-t-il de petites salles fermées pour les travaux d'équipes, y a-t-il un rayon d'ouvrages de références, y a-t-il le wifi ?  Je trouve qu'avec ces millions de mots organisés en rayons, c'est l'endroit par excellence pour étudier et faire ses travaux.  J'ai dû passer des centaines d'heures à la bibliothèque pendant mes études, le plus souvent penché sur un cahier sur la table de travail la plus éloignée de la porte à faire des problèmes de calcul différentiel, à lire un chapitre pour rattraper ou préparer le prochain cours ou à rédiger un texte à remettre.  Parfois, j'allais me perdre dans les rangées pour feuilleter des livres sans rapport à mes cours (mais c'était bien avant Internet).  L'atmosphère, l'odeur des livres, la tranquillité mêlée aux murmures d'étudiants affairés, la proximité des aires d'apprentissage, je ne sais quoi, mais j'ai toujours adopté la bibliothèque pour travailler.

La Grande Bibliothèque

Ça nous fait un assez long C finalement...  J'ai déjà hâte au DD pour Défense ?  D-Fence !  D-Fence !  D-Fence !


24 août 2014

B pour Bagel



Bagel.  Tu ne pensais quand même pas que j'allais prendre un chemin aussi direct en faisant "B pour Bouffe" pour te parler de nourriture.  Je préférais aborder la chose par le trou du bagel.

D'abord, il faut faire le point sur le régime alimentaire étudiant.  Tu dois t'assurer de toujours avoir du beurre d'arachides, du pain, des tranches de fromage enveloppées individuellement, des pâtes alimentaires, des bananes et des protéines en conserve (thon, saumon, légumineuses).  Ces éléments ont probablement le rapport nutrition/prix le plus avantageux en plus de permettre de manger sur le pouce entre deux cours, deux pratiques ou deux partys.  Toutes les autres calories proviendront des repas d'équipe, des distributrices et sans aucun doute de beaucoup de choses Made in Cowansville et surtout Made in Princeville.  À cet égard, je te conseille de profiter de tes retours en région pour rapporter les pots Mason et les plats de plastiques vides pour faire penser aux chefs de se faire aller la marmite pour renouveler le stock.

Sérieusement, j'ai réalisé beaucoup trop tard qu'une grande partie de ma subsistance pendant mes études reposait sur ce grand sac d'épicerie débordant que je ramenais au collège à chaque visite à la maison familiale.  Je le réalisais, parce que je le consommais en totalité, mais j'ai pris du temps à réaliser son impact sur mon quotidien d'étudiant et surtout à être pleinement reconnaissant.  Je t'ai déjà parlé de ma brave mère qui s'est toujours inquiété de savoir si son fils mangeait à sa faim.  Je n'ai jamais eu la chance de crever de faim tant et aussi longtemps que je pouvais porter un gros sac d'épicerie dans mon transport de retour.

Pour revenir à ton épicerie, ne te laisse pas impressionner par ceux qui survivent au nouilles Ramen à 59 cents du paquet.  Tu tougheras pas une demie-période (de cours ou de hockey) avec ça dans le ventre, même si tu en mets 12 paquets ensemble.  Aussi, pour les repas entre amis, la fondue chinoise est une idée économique si tout le monde contribue et que vous ne mettez pas le feu avec le brûleur.  C'est vraiment nul une fondue, mais c'est zéro préparation et ça te permettra de raconter à 45 ans que "Ha!Ha!Ha! maudit qu'on en a mangé de la foutue fondue !".  Petit à petit, tu vas apprendre à faire des choix économiques et nourrissants, maximiser les restants en lunchs et surtout tu vas te rendre compte en faisant le ménage de ton frigo (une seule fois après la session d'hiver) qu'avec un peu de préparation, tu aurais moins gaspillé de choses et qu'un restant d'octobre qui est resté dans le fond du frigo jusqu'en avril, ça sent le gyâbe pas à peu près.  Au fond, tout ce que tu veux, c'est manger à ta faim de sportive et d'étudiante tout en évitant de faire un trou dans ton budget.

Mais quoi que tu fasses, il y a aura toujours un trou dans les bagels.  Si je te demande si tu aimes les bagels, je suis sûr que tu vas dire que oui.  Même si tu réponds non, ça n'a aucune importance, car je suis convaincu que tu n'as jamais mangé un véritable bagel.  Crois-moi, quand tu auras mis les pieds dans une bégueulerie digne du nom à Montréal, tu n'en oublieras jamais l'arôme irrésistible et tu comprendras en croquant dans ton premier vrai bagel que Gadoua, Pom et les autres industriels ne nous vendent qu'un vulgaire pain brioché avec un trou dans le centre. 

Les bagels sont d'origine juive et il y a justement une grande communauté juive à Montréal, la deuxième en importance en Amérique après New York.  Et justement, comme les pionniers du bagel à Montréal proviennent d'une région spécifique de la Pologne, leur recette spéciale a donné une personnalité particulière au bagel montréalais qui l'oppose à celui de New-York.  Le bagel serait né en 1683 quand un roi de Pologne a sommé sa cavalerie de repousser une invasion turque aux portes de Vienne.  Pour remercier le roi, un boulanger a créé ce petit pain en forme d'étrier (d'où le trou). En allemand, étrier se dit "bügel", de là le mot bagel.  Mais je n'ai jamais compris pourquoi on a fait sauter le u devant le e pour durcir le g (On dit guel, alors que c'est écrit gel).  Ça doit être comme Josh Gorges (qu'on prononce Georges).  Ma foi.  Les bagels sont un très bon choix santé, se dégustent comme repas (fromage à la crème - ou en tranches, beurre, beurre d'arachides) ou en dessert/déjeuner (confiture, Nutella) et ne sont pas chers pantoute.  La vraie affaire (pour avoir l'air d'une initiée), c'est nature, graine de pavot ou sésame.  Il y a des variantes exotiques (au chocolat, aux oignons, etc), mais c'est comme la poutine aux piments, ce n'est pas authentique.



Deux incontournables (très près de la rue du Parc).  C'est peut-être un peu loin de ton chez-vous, mais une fois que tu auras vu l'original sur place, l'astuce est de trouver un distributeur près de chez-toi.
  • Fairmount Bagel, 74 Fairmount Ouest (donc à l'Ouest de St-Laurent)
  • St-Viateur Bagel, 263 St-Viateur Ouest  (idem)
Après le bagel, et je dirais loin derrière, Montréal est reconnu pour son sandwich à la viande fumée. Il s'agit en fait de viande de boeuf qui a été traité dans un fumoir et épicée selon une recette spéciale et servie dans du pain de seigle qui donne un sandwich d'une épaisseur impossible à se rentrer dans la bouche sans se disloquer le mandibule.  J'exagère.  Je te donne en mille l'origine ethnique de cette spécialité montréalaise: Eh oui, c'est aussi un truc juif.  Je pense que tu dois l'essayer au moins une fois, mais n'en fait surtout pas une habitude, c'est gras, plein de nitrites et c'est overrated comme on dit en anglais.  Il y a quelques places célèbres, mais les meilleures places perdent graduellement leur côté pittoresque (comme le défunt Ben's).  Je suggère d'aller faire la file au moins une fois (en hiver à -15C) à la Charcuterie Hébraïque Schwartz's au 3895 Boulevard Saint-Laurent.  C'est plus pour la salle weirdo et graisseuse que le sandwich en tant que tel.

Bien des touristes insistent pour inclure la poutine dans les spécialités culinaires associées à Montréal, mais je ne t'apprendrai rien en te disant que c'est plutôt un plat du centre du Québec inventé à quelque-part au pays de Mamie.  Montréal est probablement la pire place de la province pour déguster une bonne poutine: je n'ai encore trouvé aucun endroit qui s'approvisionne en bon fromage en grain frais.  Si tu trouves un compétiteur digne de Qualité Summum ou Ashton's, tu nous fais signe.

Pour le reste, je ne commencerai pas à t'expliquer comment faire ton Métro, ton IGA ou ton Loblaw's, mais sache que deux endroits méritent au moins une visite au temps des récoltes:
  • Marché Atwater, 138 avenue Atwater (Métro Lionel-Groulx)
  • Marché Jean-Talon, 7070 Avenue Henri Julien (Métro Jean-Talon)
Ce sont des marchés publics à ciel ouvert où on trouve de beaux produits frais.  Le piège, c'est de s'emballer devant tant de belles victuailles et de se retrouver avec une expérience de chimie organique dans le fond de son frigo en faisant le ménage à la fin de la session d'hiver (comme je disais au début).


Si on est ce que l'on mange, jusqu'à date on peut dire que tu as toujours mangé belle et intelligente.  C'est parfois un petit défi avec un budget d'étudiant, mais je suis confiant que tu sois capable d'y arriver sans tomber dans le trou (du bagel).  Bon appétit.

Le C se laissera un peu désirer, mais sera livré bientôt et ce ne sera pas Coderre...

23 août 2014

A pour Anglais


Anglais.  Drôle de mot pour commencer, mais tu verras qu'avec les mots, on peut arriver à faire des liens et arriver à des informations plus utiles qu'on aurait cru au départ.

Autrefois, les gens faisaient volontiers le raccourci suivant à propos de Montréal: Les Anglophones à l'Ouest et les Francophones à l'Est.  Ce n'était pas tout à fait faux dans le passé et c'est encore un peu vrai aujourd'hui. Cette dichotomie remonte à assez loin et se sur-simplifie très facilement.  Les Anglais, suite à leur conquête du territoire en 1759 ont investi l'espace politique et social.  L'essor industriel de l'époque a stimulé l'entrepreneurship et les leaders anglophones de l'époque (Molson, Seagram et leurs amis) ont vite pris le haut du pavé.  Les canadiens-français (comme on disait jadis) étaient victimes d'une ségrégation peu subtile,  surtout qu'ils étaient engoncés dans un catholicisme intégriste qui les poussait à faire des enfants à la pelle et tourner le dos au péché du profit. Donc, au 19e siècle et jusqu'à la moitié du 20e, à Montréal, Anglais = Riche et Français = Pauvre et exploité (à moins d'être devenu curé, médecin ou notaire). 

Comme c'est toujours le cas (à l'exception des favelas de Rio), les riches préfèrent l'altitude. Ils ont donc surtout construit leurs domaines sur les terrains plus élevés autour de la montagne (à l'ouest) et les pauvres canadiens-français, nés pour un p'tit pain, se sont entassés à l'est autour des usines où ils étaient exploités comme ouvriers sous-payés sans chance de promotion.  Les vents étant prédominants de l'ouest, il est logique de construire les usines fumantes à l'est d'une ville, surtout que les riches ne veulent pas de boucane autour de leur cabane.  On trouve bien sûr aujourd'hui une zone industrielle au sud de l'île, bien visible lorsqu'on entre par l'autoroute Bonaventure (10), mais c'est relié à la fonction portuaire de la ville et ses émanations s'évaporent au dessus du fleuve.

Cette division linguistique s'est un peu évanouie au fil du temps.  L'université de Montréal et les HEC ont fini par remettre des diplômes en science et en commerce. La révolution tranquille (1960) a fait graduellement disparaître la discrimination des francophones, qui honnêtement se l'infligeait en grande partie en baissant la tête devant les curés. Aujourd'hui, il n'y a vraiment que l'extrême-ouest de l'île qui respire en Anglais à 100%.  Dollard-des-Ormeaux (DDO), Pointe-Claire, Beaconsfield sont tous des ghettos anglophones purs et durs qui ont aussi leurs équipes de hockey (pay back time pour les francos).  En passant, si jamais tu deviens politicienne, je te conseille fortement de te présenter pour le parti Libéral dans un de ces comtés de l'ouest de l'île.  Tu n'aurais même pas à faire campagne, ni même à mettre des pancartes, car ces gens là voteraient pour une borne-fontaine, en autant que ce soit sous la bannière du parti Libéral.

Cela dit, l'ouest du centre-ville conserve tout de même des racines anglophones profondes.  Disons qu'à l'ouest de McGill, autour des rues Peel, Metcalfe, Stanley, Crescent (et ça se gâte dépassé Atwater), il n'est pas rare de se faire recevoir et servir en anglais dans les commerces.  Verdun et Lasalle échappent à cette généralisation, mais sinon, il faut insister pour acheter une paire de jeans (ou une brassière) en français.  Je suis d'avis qu'il faut insister et voter avec ses pieds si on refuse de nous servir en français (à moins de vouloir à tout prix pratiquer son anglais).

Parlant d'est et d'ouest, ça m'invite à faire un peu d'orientation générale (ah, enfin le lien).  Premier repère important, le Boulevard St-Laurent traverse l'île du Sud au Nord.  C'est là qu'on partage l'est de l'ouest.  Ainsi, pour toutes les rues orientées est-ouest, la numérotation se fait à partir du Boulevard St-Laurent.  Par exemple, si on te donne l'adresse 850 rue Jean-Talon Est, ça se situe à l'est du Boulevard St-Laurent.  À ne pas confondre avec 850 Jean-Talon Ouest, qui se trouve évidemment à l'ouest de St-Laurent.  Ça l'air niaiseux comme explication, mais comme tu n'est pas la championne gauche-droite, je prends le temps de l'expliquer.  Ainsi, ne laisse jamais quelqu'un te donner une adresse incomplète (sans le E ou le O pour les rues est-ouest), car tu pourrais te retrouver à quelques km de ta destination (au prix des tickets d'autobus, c'est non-négligeable).  Il n'y a pas cette séparation pour les rues sur l'axe nord-sud.  Simplement, la numérotation des portes augmente en s'en allant vers le nord.  Si tu as 10520 rue St-Denis, c'est plus beaucoup plus au nord que 4356 rue St-Denis.




Le centre-ville se situe très bien en se rappelant le cadre suivant (Entouré en noir sur l'illustration).  Le centre de Montréal forme un L à l'envers autour du Mont-Royal.  On peut dire que le Centre-ville est délimité par Atwater (au sud de la montagne) et du Parc à l'ouest, Papineau à l'Est, René-Lévesque au Sud, Sherbrooke (sous la montagne) et Jean-Talon au Nord.  C'est mon idée du centre-ville qui n'est pas délimité aussi nettement pour tous.  Dans cette définition, ça fait que le Centre Bell n'est pas au centre-ville, ce qui est ridicule, mais tout de même, j'aime bien ma définition, et puis merde, c'est moi qui rédige, alors c'est moi qui décide.

Sur l'axe Est-Ouest

  • La Ste-Catherine est sens-unique vers l'est.  C'est l'artère commerciale historique.
  • Maisonneuve, un paté au nord de Ste-Cath est sens-unique vers l'ouest.  C'est l'axe du métro ligne-verte.
  • Un peu plus au nord, sur le plateau de la montagne, la rue Sherbrooke est double-sens
  • Au nord de la rue Mont-Royal, l'intérêt shopping diminue.  Ce qui explique que je l'ai exclu de la carte ci-dessus.
  • Au sud de tout ça, René-Lévesque est l'artère où on trouve les grandes entreprises (Hydro, Desjardins, CGI, Sunlife, IBM, etc)

Sur l'axe Nord-Sud

  • La rue St-Denis est l'artère commerciale francophone cool. La ligne orange suit la rue Berri (un pâté à l'est).
  • La rue St-Laurent est sens-unique vers le Nord (sur une grande portion) et regroupe quelques commerces éclectiques et un potentiel de revitalisation important dans certaines sections qui font un peu pitié.
  • L'avenue du Parc borde la montagne et mène au Stade Uniprix (Tennis et autres plateaux sportifs)
  • La rue Crescent est le rendez-vous des anglos. À noter que les gens s'habillent plus chic pour sortir sur Crescent que sur St-Denis.  Toujours se rappeler que l'habit ne fait pas le moine et que la beauté, c'est dans le coco que ça se passe.
Mes coups de coeur visuels pour le centre-ville:  le coin Mont-Royal/St-Denis d'où on peut voir le Stade Olympique à l'est et le Mont-Royal en se tournant vers l'ouest.  J'aime aussi le coin Ste-Catherine/McGill College où les arbres du terre-plein sont en fleurs au printemps avec l'Université Mcgill en toile de fond au pied de la montagne.  Il y a bien d'autres endroits intéressants, mais je m'en garde pour le reste de l'alphabet.

Voilà pour le premier croquis du centre-ville.  Si tu es le moindrement perspicace, tu remarqueras certaines incongruités.  Mon ami Marc Hébert m'a toujours fait rire avec celle-là: Quand tu arrives de Cowansville par l'autoroute, c'est l'autoroute 10 Ouest.  Cette autoroute se termine au centre-ville au bout de l'autoroute Bonaventure.  Toutes les rues qui croisent par la suite, sont est-ouest.  Mais comme on arrive de l'Ouest, on s'attend que ces rues perpendiculaires soit Nord-Sud, ce qui a longtemps fait croire à Marc que Ste-Catherine était Nord-Sud.  Je pense qu'il serait encore prêt à essayer de m'en convaincre le sacripant.  La carte montre bien que l'île est un peu inclinée et qu'on a choisi d'associer l'axe est-ouest aux rues parallèles au fleuve.

Tu avais appris qu'il y avait le nord géographique (le Pôle), le nord magnétique (qui dévie un peu à l'ouest), eh bien, on en ajoute un autre: le Nord Montréalais alignée sur la flèche du sens unique du Boulevard St-Laurent.  Trop facile...  mais Monia ne l'a jamais compris !

Prochaine station, le B.  B comme Bouffe ?

22 août 2014

Introduction - Arriver en Ville

Arriver en ville.  Arriver en ville peut être intriguant, excitant, mais aussi terrorisant. Déjà, quitter le confort douillet de la cellule familiale (presque) définitivement pour fréquenter le collège en vivant en résidence étudiante est une des marches les plus abruptes dans la vie d'une jeune femme.  C'est un défi de taille, surtout quand on représente le collège au sein de son équipe de hockey.  La pente de l'escalier de la vie s'accentue soudainement, mais c'est un escarpement rempli de promesses et d'apprentissages qu'on se doit de grimper la tête bien haute.  Plusieurs (moi le premier) recommenceraient volontiers cette étape cruciale qui stimule l'esprit, construit l'assurance et prépare la carrière à venir.

Je trépigne de revivre ce passage initiatique à travers tes yeux, chère Rachel. Le départ de ton joli chez-toi champêtre, l'arrivée dans un ailleurs à aménager, un cadre académique à discipliner, une équipe de hockey à intégrer, la grande ville, ça fait beaucoup de choses à avaler en même temps.  Je ne peux pas t'aider dans bien des domaines, à part peut-être quelques travaux de philo et de calcul intégral, mais je me suis dit que je pourrais être ton humble guide pour ce qui est de la grande ville.  

Ce que je propose ici, ce sont des morceaux bien modestes de main courante sur ton escalier escarpé.  Je t'offre un abécédaire de capsules sur des sujets divers qui me permettront d'élaborer sur des thèmes propres à la ville.  Mon objectif c'est de t'aider à t'intégrer, de profiter de la cité et faire de toi une Montréalaise avertie. Il y aura 26 publications au total (de A à Z) et c'est pourquoi j'intitule ce blogue: Montréal de A à Z.

J'écrirai à la première personne et je m'adresse à toi directement.  C'est un blogue public, alors tu pourras partager à ta guise à ceux qui voudrait en profiter.  Les commentaires sont ouverts, alors j'espère que le reste de la famille ne se gênera pas pour ajouter son grain de sel au fil de l'alphabet.

Bientôt le A.